J'ai vu Les Chevals Hongrois après Souchon
- Publié dans Chartreuse Express
J'ai vu
Les Chevals Hongrois après Souchon :
Comité de rédaction de Back'n'roll :
-Si !
Je veux le faire !!
-Mais
arrête Xav, pff…tu vas pas faire un article sur Alain Souchon, voyons…
-Si !!
-Mais
qu'est-ce qu'on en a à foutre de Souchon. C'est pas le genre de la maison.
Réveille-toi Xav, houhou !!… c'est Back'n'roll ici, pas le Dauphiné Libéré !
-Je
m'en fous, je veux le faire !!
-
Ecoute, j'ai un autre truc pour toi. La ville de Seyssins organise les Chevals
Hongrois dans une petite salle en face du Prisme, l'espace Victor Schoelcher.
Vas-y faire un tour et ponds-nous un truc là-dessus !
-Les
chevals Hongrois ?!
-C'est
du rap.
-Du rap
!? C'est une blague ! Tu sais bien que j'aime pas le rap français ! "Issu
d'un peuple qui a trop souffert blablabla mes couilles" . Non, avec
Souchon, y a du texte au moins.
- Allo
maman bobo ?
-Mais
c'est pas que ça Souchon pff..!! En plus c'est la tournée en binôme avec son
pote au coeur grenadine là, je me rappelle plus son nom… ça sonne comme une
marque de biscotte…
-Heudebert
?
-Mais
non, bon laisse tomber, tu verras, je vais vous faire un papier du tonnerre !
-Ok,
mais alors tu te démerdes. Ne comptes pas sur nous pour demander une
accréditation.
Pfff,
pas facile d'être un passionné.
Contre
tout attente, je finis par vider mon compte pour m'acheter ma place.
Rectification, je vide également mon livret A et me voilà à faire la queue
devant le Summum.
Ça me
rappelle de sacrés souvenirs.
La
dernière fois que je suis venu ici, c'était pour les Pixies en 89. Ha non, après
il y a eu Nirvana. Ha ! et puis Rage Against The Machine en 98. Et puis aussi
New Model Army avec les Toy Dolls en première partie, putain c'était bon ça !
C'est
vrai qu'il fut un temps où il y avait des bons groupes qui passaient par ici.
C'était
avant Gad Elmaleh.
Je me
fait placer par une charmante hôtesse à qui je propose ma vie en échange.
Par
chance elle refuse, et je me rends vite compte que la salle est pleine à
craquer.
5000
personnes. Vu du dernier rang, ça fait bizarre.
Autant
de gens réunis dans un même endroit me fout toujours les jetons. Heureusement
qu'ils sont là pour voir un concert. Imagine si c'était pour casser de la
vaisselle, le boucan que ça ferait !
J'en
suis là dans mes réflexions vitales lorsque je vois mon hôtesse revenir vers
moi. Merde. C'est sur, elle a changé d'avis, elle veut bien de moi, qu'on fasse
des enfants, qu'on vive heureux éternellement comme tout le monde, elle, avec
son boulot d'hôtesse et moi avec le mien. Tiens, c'est quoi mon boulot au
fait…? Pfff, je me sens palôt, je vais bien me sentir con à lui dire que je
regrette, que mes pensées ont été plus vite que la réalité, et que non en fait
je…
-Si
vous le désirez, il y a une place de libre devant.
Ha ?
C'est gentil merci…hum…mais je vais rester…heu…ici. La sortie de secours est
juste à coté, et on ne sait jamais si il y a un attentat !! hahahaha !!!
Oups…absolument
terrifiant de faire une blague comme celle-ci. Les gens à coté de moi me le
font sentir instantanément. Ça veut dire que non, nous ne pouvons pas rire de
tout.
Enfin
pas des morts.
Moi, si
j'étais mort, j'aimerais bien qu'on fasse des blagues de ce genre. Je suis sur
que ça démotiverais tout de suite ceux qui veulent tuer. Faudrait qu'il trouve
autre chose pour nous faire flipper. Par exemple, si on avait peur des bonbons
haribo, et bien les terroristes nous canarderais avec des friandises. Ça serait
tout de même moins sanglant.
Mais
nous avons peur de la mort. Du sang. De la disparition… Et les djihadistes de
sauter sur l'occasion. Sans jeu de mots bien sur.
J'ai
quand même honte de me sentir si peu humain et les personnes autour de moi
n'ont pas l'air très à l'aise. J'essaie de les rassurer en leur disant que j'ai
été fouillé de fond en comble et qu'ils n'ont rien à craindre, mais ça ne
marche pas des masses.
Ouf, le
concert commence.
Et je
m'ennuie direct.
Dommage.
Voir un
vieux de 60 ans en jean slim chanter "J'ai dix ans", heu…comment
dire…
Non, et
pis ça sent la nostalgie à plein nez. Marre et archi marre de la nostalgie !!
C'est bon quoi ! Moi, je veux rêver vers l'avant, pas vers l'arrière.
Je veux
bien avouer qu'ils se débrouillent quand même pas mal sur certains morceaux.
Wasi-Wasa
est un bon guitariste-mélodiste. C'est deux là sont sans nul doute les
Lennon-McCartney français. C'est chiadé dans les harmonies y pas à dire. Et
puis sur certain texte, comme par exemple "Et si en plus, y'a
personne", pour un agnostique comme moi, là le Alain, il a trouvé les mots
justes. Drôle et poignant.
Ouais,
là ; ils m'ont touché je l'avoue.
Mais
qu'est-ce que je m'ennuie…
Je
décide donc de sortir mon sandwich aux épinards confectionné juste avant de
venir alors que je me demandais qui pouvait bien décider d'organiser des
concerts à 20h10.
Le
problème avec les épinards, c'est la crème. Ça coule. Pourquoi, elle ne
s'accroche pas aux épinards comme elle fait avec les tagliatelles carbonara ?
Mystère.
Non,
rien, ne s'accroche aux épinards. C'est une loi de la vie.
J'en
mets donc un peu partout autour de moi, et comme je suis un garçon bien, je
nettoie. Je demande à mes deux voisines si elles n'ont pas des mouchoirs en
plus ; question à laquelle elles répondent qu'il faut que je me taise
maintenant, ça suffit. Et surtout que j'arrête de bouger !
Hey, ça
va la vieille ! Pas de ma faute si on est assis sur des sièges de 30 cm de
large. Et puis a-t-on idée de regarder un concert assis ?!
Oui,
mais ça dure trois heure.
Trois
heure ?!
Une
idée totalement incongrue me vient
alors à l'esprit, je vais me casser.
Mais
voilà !!! Quel con de ne pas y avoir pensé plus tôt. Pas grave, si je me suis
ruiné pour ce concert. Pas grave. Pas grave. Pas grave. Pas grave. Pas grave.
Pas graaaaave !!!!
Je
récupère ma caisse dans le parking trop petit en offrant une clop au mec de la
sécu. Combien de temps tu vas rester debout dans le froid à garder des voitures
vides ? 4 heures ?! Putain, cette société part en couille je vous le dit.
J'ai
les nerfs en friture, pas question que j'aille me coucher alors ok je vais à
Seyssins voir du Rap.
Bordel
quelle soirée.
Comme
j'ai pas voulu boire les bières du Summum servies par les filles les moins bien
payé du monde vu la tronche qu'elles tirent, je prends quelques binches à la
station.
Et ça
me calme.
Un peu.
Dans la petite salle de
l'Espace Schoelcher je retrouve des lointaines proches connaissances, on
s'hydrate copieusement et j'évite de dire d'où j'arrive. Le concert va
commencer…Enfin est-ce qu'on appelle ça un concert quand sur scène il y un
macbook et 2 micros ? Ben oui je suis de la vieille école moi. Et j'ai pas
connu les mythiques sessions open-mic de la Grange-aux-belles.
A
première vue, ils sont drôles. Drôles et motivés. Ils attaquent direct en
faisant rimer "Martine Aubry" avec "Tartine au brie" et il
ne m'en fallait pas tant pour me mettre dans leurs poches. Je suis étonné de ne
voir aucune agressivité propre au genre ; "on va foutre le feu",
"nique la police", "je t'emmerde la France sa mère la
pute".
Vous
l'aurez remarqué, j'y connais rien au Rap français.
Je suis
impressionné par le texte qu'ils débitent. Vous apprenez tout ça par coeur ?!
Leurs gueules d'adolescents passionnés
totalement à l'aise sur scène vivent les textes de l'intérieur. L'un hyper
actif et l'autre en perpétuel rêverie lunaire, on éclate de rire, nous le
public, à se faire traiter de centriste. Je fond littéralement à la reprise de
Ta Katie Ta Quitté et le sample inespéré des pizzicatos violoneux des marquises
de Brel prouvent qu'ils ont bon gouts.
Le BPM
reste scotché à 90 et le DJ est habile sur sa turntable où le scratch renait de
ses cendres. Oui, on n'entends plus de scratch, plus personne n'en fait !
Une
bonne bande de pote à eux vient d'arriver et voilà que le micro passe de main
en main pour une fin de concert totalement freestyle. C'est bon enfant et
lorsque j'apprends que c'est depuis 2005 qu'il officie à faire des mixtapes à
la pelle, tout ça dans l'artisanat la plus total, des émissions de radios ;
tout un collectif qui apparemment savent passionnément occuper leurs temps
libre, moi je dis bravo.
Merci
les gars. Je crois que j'aime bien le rap du coup.
Le
pauvre Souchon, devait encore se sentir Bidon et Jamais content au milieu des
effluves de crème fraiche et d'épinards, mais qu'il se rassure, il sait à
présent que les Chevals Hongrois sont là pour nous faire rêver de l'avant.